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TLEMCEN ET SON HISTOIRE
TLEMCEN FRANCAISE
TLEMCEN CULTURE ET PATRIMOINE - Musées, musiques et danses.
TLEMCEN ET SON PATRIMOINE - Tenues traditionnelles de Tlemcen.
TLEMCEN ET SON PATRIMOINE - Bijoux.
TLEMCEN ET SON PATRIMOINE - Fantasia.
TLEMCEN ET SON PATRIMOINE - Monuments et gastronomie
Tlemcen : un riche héritage culturel et patrimonial.
1- Tlemcen et ses figures littéraires.
Tlemcen, ville d'histoire et de culture, recèle un patrimoine d'une richesse exceptionnelle, où se mêlent les influences berbères, arabes, andalouses et ottomanes. De nombreux écrivains, poètes, penseurs et savants ont marqué de leur empreinte l'histoire de la littérature et de la pensée algérienne. Voici quelques figures emblématiques :
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Ahmed Ben Triki (Ben Zengli) 1650-1750 |
- Ahmed Ben Triki (Ben Zengli) : né à Tlemcen en 1650, ce poète de la tribus des kouloughlis est une figure emblématique du hawzi, un genre poétique et musical populaire de Tlemcen. Ses poèmes, souvent improvisés, célébraient la beauté de la nature et les joies de la vie quotidienne. On raconte qu'il pouvait composer des vers en quelques instants, captivant son public par son éloquence et son humour piquant.
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Mohammed Dib 1920-2003 |
- Mohammed Dib : né à Tlemcen le 21 juillet 1920, mort le 02 mai 2003, un écrivain prolifique, dont l’œuvre comprend romans, poèmes, pièces de théâtre et contes pour enfants. Il recevra plusieurs récompenses. Son roman "La grande Maison" (1952), est un témoignage poignant de la misère et de la dignité du peuple algérien sous la colonisation. Il fut aussi professeur de français en Algérie, avant d'être expulsé par les autorité coloniales en 1959 à cause de ses prises de position politiques.
- Mohamed Ben M'Sayed : né à Tlemcen au 17e siècle, poète du Melhoun, un genre populaire ancré dans la tradition orale, il enrichi le patrimoine culturel tlemcénien avec des textes chantés lors de mariages fêtes religieuses ou cérémonies populaires. Ses vers évoquaient l'amour, l'exil, la nature et les valeurs traditionnelles, avec une sensibilité unique.
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Waciny Laredj, 08 août 1954 |
- Waciny Laredj : né à Tlemcen le 08 août 1954, romancier et professeur universitaire, il est l'un des écrivains algériens contemporains les plus traduits. Son œuvre, profondément ancré dans l'histoire maghrébine, aborde des thèmes comme la mémoire, l'exil et la guerre. Installé à Beyrouth, puis à Paris, il continue d'écrire en arabe et en français. Il a également été finaliste du Prix International de la fiction arabe.
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Latifa Ben Mansour, 1950. |
- Latifa Ben Mansour : Née à Tlemcen en 1950, romancière, linguiste et psychanalyste née à Tlemcen. Ses romans comme "La prière de la peur", abordent des sujets sensibles tels que la violence, l'identité féminine, la guerre et la mémoire. Elle milite pour la promotion des droits des femmes et de la diversité culturelle en Algérie et en diaspora.
- Mohamed Ibn Youcef Al-Sanoussi Al-Tlemceni : né à Tlemcen en 1426-1490, est un théologien et penseur de Tlemcen il fut une figure centrale de la doctrine "ash'arite" et de l'école malékite. Fondateur de plusieurs zaouïas, il est aussi l'auteur d'ouvrages théologiques majeurs comme "Umm al-Barahin", enseignés encore aujourd'hui dans les écoles religieuses d'Afrique du Nord. Son influence a traversé les siècles et les frontières, faisant de lui l'un des savants les plus respectés du Maghreb.
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Sidi Abou Madyan Al-Ghawth |
- Sidi Abou Madyan Al-Ghawth : Né à Séville en 1126-1198, il s'installa à Tlemcen où il fonda une école soufie. Sa zaouïa, située à El-Eubbad, est un haut lieu de pèlerinage. Son enseignement, basé sur l'humanité et la purification de l'âme, a profondément influencé la mystique islamique au Maghreb.
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Cheikh Mohammed Tahar Fergani |
- Cheikh Mohammed Tahar Fergani : né en 1928-2016, chanteur et poète de malouf tlemcénien, il a été l'un des grands maîtres de la musique arabo-andalouse. Connu comme le "Rossignol de Tlemcen", il a transmis oralement une partie du patrimoine poético-musical de la ville à travers ses textes et son enseignement.
2- Patrimoine architectural, un voyage à travers les siècles.
- La Grande Mosquée de Tlemcen, un joyau de l'art almoravide (XIIe siècle) : Construite en 1136 sous l'autorité de l'Emir Ali Ben Youcef, fils de Youssef Ibn Tachfin, cette mosquée est l'un des rares vestiges encore intacts de l'architecture almoravide. Elle frappe par son plan rectangulaire, son minaret sobre, et surtout par son "mihrab" délicatement ciselé, encadré de colonnes en marbre sculpté. Le "minbar" (chaire en bois) d'origine, réalisé à Cordoue, est l'un des plus anciens du Maghreb.Il est aujourd'hui conservé dans un musée pour sa valeur inestimable. Il est dit que durant les travaux de rénovation au début du 20e siècle, on découvrit une petite citerne sous le sol de la salle de prière. Les anciens affirment qu'elle alimentait une fontaine intérieur, dont l'eau était réputée pour guérir les maux de tête. D'anciens fidèles en buvaient quelques gouttes avant la prière.
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L'entrée du Mausolée de Sidi Boumédiene |
- Le Mausolée de Sidi Boumédiene, haut lieu de spiritualité soufie : Érigé en l'honneur de Sidi Abou Madyane Chouaïb (1126-1198), mystique andalou et grand maître soufi, ce complexe religieux du 13e siècle d'élève sur les hauteurs de Tlemcen, à El-Eubbad. Il attire depuis des siècles des pèlerins venus d'Algérie, du Maroc et même de l'Andalousie, pour y chercher la baraka (bénédiction). Un ensemble architectural harmonieux , le complexe comprend une mosquée à arcades fines, une medersa au plafond sculpté de bois de cèdre, les coupoles vertes vernissées, ainsi qu'un tombeau orné de zelliges aux couleurs apaisantes. Une croyance tenace affirme que quiconque rêve de Sidi Boumédiene verra un vœu se réaliser. D'autres disent que les oiseaux ne survolent jamais directement le tombeau,par respect spirituel.Le grand soufi Abdelkader Al-Jilani lui aurait adressé une lettre de respect, signe de l'estime immense qu'il suscitait dans les milieux mystiques de l'époque.
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Le Mechouar |
- Le Mechouar : citadelle royale, située au cœur de la médina, la citadelle du Mechouar, du mot turco-arabe "majlis", signifiant "lieu de conseil", fut construite vers 1082 par les Almoravides. Elle devint plus tard le centre administratif et militaire des zianides, les souverains du royaume de Tlemcen (13e - 16e siècles). Le palais royal, aujourd'hui partiellement restauré, accueillait jadis les audiences du sultan, les cérémonies officielles et les ambassades étrangères. Il comprenait des hammams, des jardins andalous, des salons décorés de stucs, et des bassins d'eau claire. En 1335, durant le siège imposé par les Mérinides du Maroc, les femmes de Tlemcen participèrent à la défense de la citadelle en versant de l'huile bouillante depuis les remparts. Une chanson populaire commémore encore leur bravoure. Aujourd’hui le Mechouar abrite un musée riche en manuscrits anciens, armures, pièces de monnaie zianides, et instruments de musique traditionnels. Une promenade dans ses cours révèle des vestiges émouvants : colonnes, niches sculptées, et vues imprenables sur la vieille ville.
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La Mosquée Sidi Bel Hassan (14e siècle) |
- La Mosquée Sidi Bel Hassan (14e siècle) : construite à l'époque zianide, elle se distingue par son minaret en briques vernissées et sa coupole finement décorée. C'était l'une des écoles religieuses les plus prestigieuses de Tlemcen.
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La médersa dans les années 1870, avant sa démolition. |
- La Medersa Tachfinia : fondée par Abou Tachfin au 14e siècle, elle forma des générations de savants, avec un patio central, des cellules pour étudiants, et des galeries ornées de faïence. Selon un manuscrit conservé à la bibliothèque nationale, l'un des premiers traducteurs du Coran en berbère y aurait étudié au 15e siècle.
3- Tlemcen, son artisanat et ses traditions.
L'artisanat occupe une place de choix dans la culture de Tlemcen. Les artisans perpétuent des savoir-faire ancestraux dans la dinanderie (travail du cuivre), la poterie, le tissage de tapis aux motifs complexes et la confection de bijoux traditionnels en argent et en pierres précieuses. La musique, avec le Hawzi, et les traditions orale, avec leurs contes et légendes, sont également des éléments importants de l'identité culturelle de Tlemcen. Un langage silencieux, un héritage transmis par les mains, les regards et les silences. Chaque métier d'art reflète la profondeur d'une civilisation ancrée dans le temps, mariant beauté, utilité et symbolisme. Ici, l'artisan est à la fois artiste, historien et gardien d'une mémoire vivante.
- La dinanderie : l'art de donner vie au cuivre, parmi les ruelles étroites de la médina, le tintement métallique du marteau sur le cuivre rythme la journée des dinandiers, maîtres dans l'art de façonner ce métal rouge au reflets chauds. Cette tradition, est encore pratiquée dans les ateliers familiaux où les outils sont parfois centenaires. les objets emblématiques tels que les plateaux de thé gravés de vers poétiques, les lampes suspendues à motifs floraux ajourés, encensoirs, et bassins pour ablutions. Il est dit qu'au 19e siècle, un artisan célèbre surnommé Si Al-Hadj Mohamed l'Ouakif, réalisait des plateaux de cuivre pour les notables ottomans, où il incrustait discrètement des symboles mystiques pour porter chance à leurs propriétaires.
- La poterie : la poterie tlemcénienne est un art humble, enraciné dans la nature. Utilisant une argile rougeâtre des collines avoisinantes, les potiers modelaient des formes à la fois simples et nobles. Les poteries étaient autrefois cuites dans des fours à bois communautaires, à flanc de montagne. Avec des décorations typiques de Tlemcen, des bandes géométriques, des spirales, et parfois des dessins de dattiers stylisés ou de poissons, symbole de fertilité. Certains anciens affirment que la terre utilisée pour ces poteries devait être extraite à la lune montante, pour que les jarres destinées à conserver l'huile ou l'eau n'explosent pas au séchage.
- Le tissage de tapis, un art ancestral aux motifs complexes : Les tapis de Tlemcen, souvent tissés à la main par les femmes dans les maisons, sont des œuvres d'art codées. Chaque motif, chaque couleur, raconte une histoire, exprime un vœu, une protection ou un souvenir. Le "Zarbia Tlamecenienne", souvent confectionnée en laine de mouton ou en soie, est réputée pour sa finesse et sa symbolique. Les motifs utilisés sont les rosaces, losanges, arbres de vie, étoiles. On dit que lorsqu'une jeune fille achevait son premier grand tapis, il était suspendu à la fenêtre de sa maison pendant plusieurs jours. Cela signalait aux familles voisines qu'elle était prête à se marier et à fonder un foyer.
- La confection de bijoux traditionnels : Le bijou tlemcenien, en argent fin, se distingue par son raffinement, sa richesse ornementale et sa charge symbolique. Héritiers de techniques berbères, andalouses et ottomanes, les artisans de Tlemcen façonnent des colliers, fibules, diadèmes, broches et ceintures que les femmes arborent fièrement lors des mariages. Une fibule en forme de triangle inversé évoque la protection maternelle, tandis que les pierres comme le corail sont censées éloigner le mauvais œil. Il était coutume qu'à la naissance d'une fille la grand-mère offre une petite bague en argent gravée de versets coraniques, elle devait la porter jusqu'à ses fiançailles, comme un talisman de protection et d'espoir.
- La musique : le hawzi, un héritage immatériel précieux. Le Hawzi, ñé de la musique andalouse classique, a été nourri par la sensibilité tlemcénienne. Ce genre musical aux accents mélancoliques, interprété avec passion, fut popularisé dès le 17e siècle dans les salons lettrés et les cercles féminins de la ville. Les poèmes chantés, souvent en dialecte savant, abordent l'amour, la nature, l'exil ou la spiritualité. Le Oud (luth), le rebab (vièle à archet), le qanun (cithare) et la derbouka, sont les instruments emblématiques de la musique tlemcénienne. La célèbre chanteuse Fadhéla Dziria, qui avait des racines tlemcéniennes, aurait appris ses premières chansons hawzi lors d'un séjour dans une zaouïa de la région, impressionné par les voix féminines chantant au rythme des tambours sacrés.
- Les traditions orales, contes et légendes, gardiens de la mémoire. A la tombée de la nuit, dans les patios entourés de citronniers, les anciens racontaient aux enfants des histoires fabuleuses. Ces contes, transmis à l'oral depuis des siècles, nourrissaient l'imaginaire et enseignaient la sagesse populaire. On y croisait des géants, des derviches volants, des lions parlants et des princesses aux pouvoirs magiques. Lalla Aïcha, une femme ensorcelée quo vivait dans une source cachée, et que les enfants appelaient en jetant trois galets en cercle. Avant les grands mariages, une conteuse appelé Raqassa était parfois invitée à ouvrir la parole en racontant une histoire bénie, censé porter chance à la nouvelle union.
A Tlemcen, l'artisanat et les traditions ne sont pas figés dans le passé : ils vivent dans les gestes quotidiens, les objets transmis, les mots chuchotais et les chansons fredonnées. Ce patrimoine immatériel est le coeur battant de la ville, son âme éternelle, que chaque génération se doit de protéger, d'aimer et de faire rayonner.
4- L'influence Andalouse : un héritage précieux à Tlemcen.
L'histoire de Tlemcen est indissociable de celle de l'Andalousie musulmane, cette brillante civilisation qui régna sur la péninsule ibérique pendant 8 siècles. Lorsque les royaumes chrétiens achevèrent la Reconquista et que Grenade tomba en 1492, des milliers de familles musulmanes, juives et morisques prirent le chemin de l'exil. Tlemcen, alors capitale du royaume zianide et centre intellectuel et spirituel majeur du Magreb, fut l'un de leurs principaux refuges. Cette immigration a profondément marqué la ville, qui a conservé de fortes influences andalouses dans son architecture, la musique, sa gastronomie et ses traditions.
Cette migration massive fit de Tlemcen un véritable sanctuaire andalou, où les traditions ibériques musulmanes prirent racine et se mêlèrent harmonieusement à l'héritage local. Aujourd'hui encore, Tlemcen incarne la mémoire vivante d'Al-Andalus.
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Le minaret de la mosquée El Mansourah |
- Architecture : une empreinte andalouse dans les pierres de Tlemcen. Le style architectural andalou, raffiné et géométrique, s'est exprimé avec éclat dans les ruelles, mosquées et palais de Tlemcen. Les cours intérieures ou patio central arborées, les fontaines en marbre, les colonnes à chapiteaux finement sculptés, les zelliges, petites mosaïques vernissées aux motifs étoilés, les arcs outrepassées et le mashrabiyas en bois sculpté confèrent aux maisons tlemcéniennes une élégance sobre, presque mystique. La mosquée Sidi Boumédiene, restaurée au 16e siècle, montre une influence évidente du style nasride de Grenade, notamment dans l'arcature polylobée de sa façade et ses inscriptions coraniques en écriture cursive andalouse. La légende raconte que des maîtres maçons andalous venus de Cordoue furent accueilles par la cour zianide avec honneurs. Ils auraient formé une confrérie secrète de bâtisseurs, chargée de transmettre les techniques du stuc et du zellige à la génération suivante, dont certains descendants continuent à œuvrer dans les médersas aujourd'hui. Selon une tradition orale, le sultan Abou Hammou Moussa II, fit venir de Grenade des artisans spécialisés pour décoré la mosquée de Sidi Boumédiene. Ces maîtres bâtisseurs auraient dissimulé des motifs symboliques de leur Andalousie perdue dans les zelliges du mihrab, comme un adieu codé à leur terre natale. Le minaret de la mosquée El Mansourah, avec se briques décoratives et ses arcatures, est souvent comparé à la Giralda de Séville. Cela témoigne des échanges architecturaux entre les deux rives.
- Musique : La nouba andalouse, un joyau de la musique maghrébine, constitue une tradition musicale précieusement conservé à Tlemcen. La nouba andalouse est sans doute l'héritage le plus raffiné et le plus vivant de cette époque. Transmise de maître à élève selon une tradition rigoureuse, la nouba tlemcénienne conserve intactes des formes musicales datant du califat omeyyade de Cordoue. Chaque composition, souvent poétique, suit un enchaînement mélodique très structuré et puise dans les grandes émotions humaines : amour, nostalgie, spiritualité. Une nouba complète dure près d'une heure et demie, divisée en mouvements appelés Mchalia, Btaihi, Derj, Insiraf et Khlas. Elle suit un mode musical bien précis (le tab') parmi les onze encore pratiqués. Des manuscrits anciens conservés à Tlemcen mentionnent un musicien andalou du nom de Ziryab, qui aurait influencé le style de vie et l'esthétique musicale dans les cours de l’Afrique du Nord, jusqu'à fixer les usages de la Nouba. Il est dit que certaines Nouba interprétées aujourd'hui à Tlemcen ont été transmises oralement depuis le 15e siècle, sans jamais avoir été notées. Des familles entières, comme les Ben Khemis ou les Touil, se sont consacrées à la préservation de ce répertoire, le considérant comme un legs sacré. L'institut de musique de Tlemcen organise régulièrement des veillées andalouses, où jeunes et anciens se réunissent pour chanter et jouer, en forçant la transmission intergénérationnelle.
- Cuisine : Des saveurs andalouses à la table tlemcénienne. La gastronomie tlemcénienne s'est enrichie grâce à l'arrivée des exilés andalous, dont les recettes fusionnaient déjà les traditions berbères, arabes et méditerranéennes. Ils ont introduit des ingrédients tels que les fruits secs, les amandes, la fleur d'oranger, et des techniques comme le glaçage au miel, la farce sucrée-salée et la cuisson lente en tajine. On dit qu'une princesse andalouse réfugiée à Tlemcen, connue sous le nom de Lalla Mariem, aurait transmis la recette du tajine hlou au cuisinier royal, qui le servit lors d'un mariage princier, marquant sont entrée dans la cuisine de fête tlemcénienne. Une chronique locale raconte également qu'un jardinier andalou du nom de Don Youssef Al-Maliki aurait introduit les premières orangeries dans la région de Tlemcen. Sa méthode de greffe fut ensuite adoptée dans toute la vallée du Tafna. Avant l'interdiction de l'alcool, certains andalous musulmans de Tlemcen produisaient un vinaigre doux de grenade, utilisé pour mariner les viandes et parfumer les sauces.
5- Saveurs de Tlemcen : une gastronomie raffinée.
La gastronomie de Tlemcen est un art de vivre, un héritage façonné au fil des siècles par les rencontres, les migrations et les échanges culturels. Elle reflète l'âme raffinée de la ville, entre raffinement andalou, racines berbères, influences orientales et touches ottomanes. Chaque plat raconte une mémoire collective, un souvenir d'enfance, un geste transmis en silence dans les cuisines familiales.
- Le couscous, un plat emblématique aux mille et une variations : A Tlemcen, le couscous est bien plus qu'un simple mets, c'est une institution. Symbole d'hospitalité et convivialité, il est au cœur des repas familiaux et des grandes célébrations. Sa préparation requiert patience, précision et respect des traditions. La semoule est travaillée à la main dans de grands plats appelés gasâa, souvent en groupe et dans une ambiance joyeuse. Chaque grain est roulé avec soin, humidifié, tamisé, puis cuit à la vapeur 3 fois, selon le savoir-faire ancestral. Cette méthode donne une texture légère, aéré, presque fondante. Il existe à Tlemcen un couscous du vendredi appelé Skesou bel khodra, réparé sans viande, uniquement avec des légumes de saison, en signe d'humilité. On dit qu'autrefois, les mères y glissaient une pois chiche ou une datte entière porte-bonheur pour l'enfant de la maison.
- Les tajines : les tajines tlemcéniens allient raffinement et générosité. Leur cuisson lente permet aux saveurs de se mêler harmonieusement. Le plat en terre cuite utilisé joue aussi un rôle essentiel dans la concentration des arômes.
- Tajine hlou : Plat festif par excellence, mélange sucré-salé de viande tendre, pruneaux, abricots, amandes, parfumé à la cannelle et au miel. Il est souvent servi lors de l'Aïd, le ramadan ou les mariages.
- Tajine zitoune : Recette savoureuse à base de poulet, olives vertes, champignons et citron confit, souvent épaissie avec une touche de farine ou de jaune d’œuf.
- Tajine bel karnoun (aux artichauts) : Variante plus rare, mais très prisée au printemps.
Les plus anciens racontent que les fiancées apprenaient à préparer le tajine hlou pour leur belle-famille, car sa réussite était considérée comme un gage d'honneur culinaire.
- Les gâteaux traditionnels : un art délicat transmis par les femmes. Les douceurs tlemcéniennes ne sont pas simplement sucrées, elles sont sculptées,ciselées, façonnées avec un soin quasi artistique.Préparés pour les mariages, les naissances ou le Mawlid.
- Makroud el louse : A ne pas confondre avec son homonyme, ici il s'agit d'un moelleux à base d'amandes, parfumé à l'eau de rose, et décoré de fines feuilles d'argent.
- Mchewek : Gâteau moelleux roulé dans les amandes effilées, cuit juste assez pour conserver son moelleux, souvent servi avec un thé à la menthe algérien.
- Ghribia bel smen : Sablé fondant à base de beurre clarifié (smen), parfois décoré d'une amende au centre.
- Autres spécialités culinaires de Tlemcen : un terroir riche et généreux.
- Barkoukesh : Soupe réconfortante à base de petites pâtes roulées à la main, de légumes sec, de pois chiches, parfois agrémentée de viande fumée. C’est un plat d'hiver, souvent partagé dans une ambiance chaleureuse.
- Zerd : Crème de riz onctueuse, parfumée à la cannelle et à l'eau de rose, parfois décorée de pignons ou d'amandes. Ce dessert est traditionnellement servi lors de la naissance d'un enfant ou du Mawlid.
- Hmiss : Simple et savoureux,cette salade de poivrons grillés, tomates et ail, est un incontournable des tables estivales. Elle est souvent accompagnée de pain maison cuit dans un tajine en terre.
6- Tlemcen, ville d'histoire et de savoir.
Au croisement des routes du commerce transsaharien et méditerranéen, Tlemcen rayonna durant le moyen âge comme un phare de civilisation. Capitale du royaume zianide (1235-1550), cette cité berbère musulmane s'imposa comme un carrefour stratégique entre l'Orient, l'Occident, l'Afrique et l'Europe. Elle devint une capitale brillante, où la science côtoyait l'art, où le commerce animait les souks, et où l'architecture rivalisait avec la beauté des jardins andalous. Tlemcen abritait des bibliothèques et des universités réputées, attirant des érudits et des étudiant de tout le Maghreb.
- Le royaume zianide : un âge d'or pour Tlemcen. Le royaume zianide, fondé par Yaghmoracen Ibn Ziane en 1235 après la chute des Almohades, s'affirma rapidement face ses puissants voisins, les Mérinides et les Hafsides. Il fit de Tlemcen une ville fortifiée et prospère et cultivée.L'indépendance politique du royaume reposa sur une habile diplomatie,un enracinement tribal et un contrôle des routes commerciales. Sous les zianides, Tlemcen fut embellie parla construction de mosquées, bains publics, médersas, jardins et palais. Le roi Abou Hammou Moussa II fit notamment édifier la célèbre Mosquée Sidi Boumédiene, joyau de l'architecture maghrébine du 14e siècle. On raconte que les rois zianides faisaient venir des maîtres artisans andalous pour travailler le bois de cèdre, les mosaïques de zellige ou les plafonds sculptés. Des caravanes entières partaient de Grenade pour fournir les matériaux rares aux bâtisseurs de la cité.
- Tlemcen, centre intellectuel : une ville d'érudit et de savoir. Tlemcen devint rapidement un centre intellectuel majeur, attirant des étudiants, des théologiens, des médecins, des astronomes et des artistes de tout le Maghreb. On y enseignait la grammaire arabe, le droit malikite, la logique, mais aussi les mathématiques, l'astronomie et la philosophie. Les grandes madrassas de la ville, comme la médersa de Sidi Boumédiene, proposaient un enseignement rigoureux. Les professeurs étaient choisis pour leur réputation et leur piété. Les étudiants, souvent logés sur place, bénéficiaient de bourses et de repas fournis par des waqfs (fondation pieuses).
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Ibn Khaldoun (1332-1406) |
- Ibn Khaldoun (1332-1406) : Lors de ses passages à Tlemcen, il y enseigna et mena des débats intellectuels de haut niveau. Il décrit Tlemcen dans ses écrits comme "une ville où la science s'enseigne à voix haute".
- Al-Sanoussi (1433-1493) : Fondateur d'une école théologique influente, il rédigea plusieurs traités de théologie et de logique, encore étudiés aujourd'hui dans les universités islamiques.
- Cheikh Al-Abisarî : Moins connu, ce juriste de Tlemcen laissa une œuvre considérable en droit et en éthique. Il forma de nombreux étudiants qui diffusèrent son enseignement jusqu'au Caire et à Tunis.
- Le commerce et l'économie : une ville prospère au carrefour des routes. Grâce à sa position stratégique, Tlemcen devint une étape clé du commerce transsaharien. Le caravanes partaient de vers Tombouctou, ramenant or , ivoire, plumes d'autruche et esclaves, tandis que les bateaux accostaient à Oran ou Honaïne avec des cargaisons de soieries, d'épices ou de céramiques. La ville comptait plusieurs souks spécialisés : le souq al-hadid pour les forgerons, le souq al-attarin pour les parfums et les épices, le souq al-dhahab pour l'orfèvrerie. Tlemcen était aussi réputée pour sa teinture du cuir au rouge de garance, très prisée dans le bassin méditerranéen. Selon des chroniqueurs, le marché aux épices de Tlemcen était si réputé que même des marchands de gênes et de Barcelone y envoyaient des intermédiaires pour négocier les prix du safran ou du musc.
- L'héritage Zianide : un patrimoine précieux à préserver. L'empreinte des Zianides est encore visible aujourd'hui à travers l'architecture, les traditions et les manuscrits conservés dans des familles ou des mosquées anciennes. Les vestiges des anciennes murailles, les fontaines publiques et des coupoles funéraires témoignent d'un âge d'or que l'on cherche aujourd'hui à restaurer et valoriser. Lors de fouilles près de l'ancien quartier royal, des chercheurs ont retrouvé un fragment de vitrail andalou incrusté dans une lucarne, preuve des échanges artistiques entre Tlemcen et Grenade au 14e siècle.
7- Fêtes et festivals.
Tlemcen, ville d'art et d'histoire, est animée tout au long de l'année par un calendrier riche et varié de fêtes et de festivals. Ces événements, qui célèbrent le patrimoine, la créativité et les traditions locales sont une occasion unique de découvrir l'âme de Tlemcen, de vibrer au rythme de sa musique, de s'émerveiller devant sont artisanat et de savourer sa gastronomie.
- Le festival international de la musique andalouse et des musiques anciennes (généralement en décembre) : Cet évènement majeur met à l'honneur la musique andalouse, héritage précieux de l'immigration andalouse à Tlemcen. Des orchestres et des artistes venus du monde entier se produisent sur scène, offrant au public un voyage musical au cœur de l'Andalousie. Le festival est également l'occasion de découvrir d'autres musiques anciennes, venues de différentes cultures et civilisations. Lors de ce festival, les ruelles de la ville se transforment en scènes improvisées où des musiciens ambulants jouent pour le plaisir des passants, créant une ambiance festive et conviviale.Le festival propose également des conférences, des ateliers et des expositions sur la musique andalouse et les musiques anciennes.
- La célébration du Mawlid Ennabawi (naissance du prophète) : Cette fête religieuse, célébrée par les musulmans du monde entier, prend une dimension particulière à Tlemcen. Les mosquées sont illuminées, des chants religieux sont récités, et des repas sont partagés en famille et entre amis. La ville est décorée de guirlandes et de lumières créant une atmosphère festive et spirituelle. Autrefois, lors du Mawlid Ennabawi, les familles de Tlemcen préparaient des gâteaux traditionnel, tels que le makroud et la ghribia, qu'elles offraient à leurs voisins et à leurs proches.

- La fête du yennayer (nouvel an berbère) : Célébrée le 12 janvier, cette fête marque le début de l'année agricole berbère. A Tlemcen, le Yenneyer est l'occasion de célébrer la culture et les tradition berbères, à travers des chants, des danses, des contes et des plats traditionnels. Lors du Yenneyer, les familles de Tlemcen préparent un plat spécial appelé "imensi n Yennayer", composé de 7 légumes différents.
- Les Moussem (fêtes religieuses locales) : Plusieurs Moussem, fêtes religieuses locales en l'honneur de saints locaux, se déroulent dans les environs de Tlemcen. Ces fêtes sont l'occasion de pèlerinages, de prières, de chants, de danses et de foires artisanales. Lors des Moussem, les habitants des villages voisins se rendent à Tlemcen pour vendre leurs produits agricoles et artisanaux, créant une ambiance animée et colorée.
- Les mariages traditionnels : Les mariages traditionnels à Tlemcen sont de véritables spectacles, qui durent plusieurs jours et qui mettent en valeur le patrimoine culturel de la ville. Les mariés portent des costumes traditionnels richement ornés, les femmes chantent et dansent, et des repas somptueux sont servis. Lors des mariages traditionnels à Tlemcen, les femmes se maquillent avec du khôl et de la henna, et portent des bijoux en argent et en pierres précieuses.
- Les célébrations de l'Aïd (Aïd el-fitr et Aïd el-adha) : Ces fêtes musulmanes sont célébrées avec ferveur à Tlemcen. Les familles se réunissent pour prier, partager des repas et échanger des cadeaux.
8- Vestiges préhistoriques de Tlemcen : un voyage aux origines de l'humanité.
La région de Tlemcen, est bien plus qu'une terre d'histoire médiévale et d'artisanat raffiné. Sous la surface, elle recèle un trésor inestimable, des témoignages d'une présence humaine millénaire, qui remontent au cœur même de la préhistoire. Le nombreux gisements archéologiques disséminés dans ses plateaux calcaires et ses reliefs accidentés racontent une histoire fascinante, celle des premiers hommes ayant foulé ces terres, chassé, fabriqué leurs outils, et lutté pour leur survie dans un environnement changeant.
La topographie de Tlemcen, avec ses grottes naturelles et abris sous roche, a offert aux populations anciennes des refuges idéaux, des capsules temporelles où ses ont conservés des vestiges essentiels, offrant aujourd'hui aux chercheurs un éclairage précieux sur la vie préhistorique en Afrique du Nord.
- Le lac Karar : Situé à quelques kilomètre de Remchi, ce site est l'un des plus connus de la région. Les fouilles ont révélé des vestiges d'animaux aujourd'hui disparus de la région, tels que des éléphants, des rhinocéros, des bovidés et des gazelles. On y a également découvert des outils en pierre taillée, dont certains proviennent de régions éloignées comme Beni-Saf et les Traras, ce qui attestent de l'ingéniosité et de la capacité d'adaptation de l'homme préhistorique, on peut imaginer des échanges, des voyages, des rencontres entre ces populations nomades, dont la vie est rythmée par les saisons et la migration des animaux. Une faune étonnante, témoignant d'un climat plus humide et d'une biodiversité florissante.
- Les grottes d'Ouzidane : Surnommées les "grottes du vent", en raison des courants d'air qui les traversent, ces grottes ont été explorées dès le 19e siècle par des scientifiques tels qu'Alfred Chancogne et Gustave Mary Bleicher, pionniers de l'archéologie en Algérie. Les fouilles ont mis au jour des bifaces acheuléen, des outils en pierre caractéristiques du paléolithique inférieur, ces outils permettaient de chasser, de dépecer les animaux et de se protéger du froid. Des fragments de poteries berbères témoignent également d'une occupation humaine plus récente, illustrant la continuité de la présence humaine dans ces lieux.
- Les grottes de la Mouilah : Un trésor de microlithes révélé par Paul Pallary. Au début du 20e siècle, Paul Pallary, un naturaliste passionné, explore les grottes de la Mouilah et y découvre une abondance de microlithes, ces minuscules outils en silex caractéristiques du Paléolithique supérieur. Ces petites lames, souvent utilisées comme éléments de flèches ou de harpons, témoignent d'une évolution des techniques de chasse et d'une plus grande spécialisation des outils.
- Les grottes de Tafessera : Entre sanctuaires et abris, les secrets des "grottes des pigeons". Également connues sous le nom de "ghar el hammam" (grottes des pigeons), les grottes de Tafessera ont été explorées plus récemment par des chercheurs du CNRPAH (Centre National de Recherches Préhistoriques, Anthropologiques et Historiques). Les fouilles ont révélé des outils en pierre taillée qui servaient probablement d'abris temporaires, voire de lieux de culte, offrent un aperçu précieux de la vie quotidienne des populations préhistoriques à la fin de la dernière période glaciaire.
- Les grottes de Bouhanak : Ce site archéologique,composé de 6 grottes, a fait l'objet de fouille menées conjointement par les universités de Tlemcen et de Barcelone. Cette collaboration internationale a permis de mettre en commun les compétences et les connaissances pour mieux comprendre le passé préhistorique de la région. Les chercheurs y ont découvert des microlithes, confirmant l'importance de ce site pour l'étude du Paléolithique supérieur.
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Le bassin de la Tafna |
- Le bassin de la Tafna : Découvert en 2016, le bassin de la Tafna a déjà livré des informations précieuses sur l'environnement et les populations qui vivaient dans la région il y a des milliers d'années. Les premières fouilles ont permis de mettre au jour des outils en pierre taillée, des reste d'animaux (bovidés, rhinocéros, hyènes) et des œufs d’autruche, un indice précieux sur les habitudes alimentaires et les ressources exploitées.
- Les grottes de Boudghene : Explorées au 19e siècle par Gustave Mary Bleicher, les grottes de Boudghene ont livré des haches polies des outils caractéristiques du Néolithique. Cette période marque un tournant majeur dans l'histoire de l'humanité, avec l'apparition de l'agriculture, de l'élevage et des premières communautés sédentaires. Les haches polies, utilisées pour défricher les forêts et construire des habitations, sont le symbole de cette révolution.
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Bab El Kharmadine |
- Bab El Kharmadine : Ironie de l'histoire, c'est au pied d'une porte monumentale édifiée au 11e siècle par les Almoravides que fut découvert, en 1945, un polissoir néolithique. Cette pierre, utilisée pour aiguiser les outils en pierre, témoigne d'une occupation humaine beaucoup plus ancienne, antérieure de plusieurs millénaires à la fondation de Tlemcen.
- Les abris de Sidi Medjdoub : Situés à quelques kilomètres au sud-ouest de Tlemcen, les abris sous roche de Sidi Medjdoub offrent un témoignage exceptionnel des activités humaines au cours du paléolithique moyen et supérieur. Des gravures et des peintures rupestres ont été découvertes dans ces abris, représentant des scènes de chasse, des animaux sauvages et des symboles géométriques, témoignant d'une expression artistique ancienne. L'étude de ces peintures laisse penser que ces populations avaient déjà développé une forme de communication symbolique et de spiritualité liée à leur environnement naturel, un art précurseur des grandes traditions rupestres du Maghreb.
- Le site de Kef Zerouala : Un témoin des premiers chasseurs. A l'est de Tlemcen, le site de Kef Zerouala est reconnu pour ses outils lithiques particulièrement bien conservés, datés du Paléolithique inférieur. On y a retrouvé des éclats de pierre taillée et des nucléus, témoignant des techniques primitives de taille du silex utilisées par les premiers habitants de la région. Des fouilles récentes ont montré que ce site était probablement un lieu de passage saisonnier, utilisé par des groupes mobiles suivant la faune locale, avant de s'installer plus durablement dans des abris plus confortables.
- Les cavernes de Tighremt : Traces d'une vie nomade. Les cavernes de Tighremt, nichées dans une région montagneuse proche de Tlemcen, ont livré des vestiges de campements temporaires datant du Paléolithique supérieur. On y a découvert des restes d'outils en os, des fragments de foyers, et des restes alimentaires, qui révèlent une vie nomades s'adaptant aux ressources fluctuantes de leur environnement. Certains outils portent des traces d'usure très particulières, suggérant que leurs utilisateurs fabriquaient eux-mêmes leurs armes de chasse, utilisant des techniques raffinées pour optimiser leurs chances de succès.
- Le site de Hassi El Ghozlane : Au sud de Tlemcen, le site de Hassi El Ghozlane s'est révélé comme un véritable carrefour pour les populations préhistoriques. Des outils en pierre taillée, mêlés à des restes d'animaux divers, montrent que cette zone était un point de rassemblement et d'échanges entre groupes nomades venus des montagnes, des plaines et du littoral. Ce site illustre parfaitement la diversité écologique de la région à l'époque préhistorique, où les hommes savaient exploiter des biotopes très différents, adaptant leurs techniques aux multiples défis naturels.
- Le gisement de Ras El Ma : Plus proche du littoral le gisement de Ras El Ma a livré des vestiges du Mésolithique, une période charnière entre la fin du Paléolithique et le début du Néolithique. On y a trouvé des outils de transition, plus sophistiqués, ainsi que des reste de coquillages, preuve d'une exploitation plus poussée des ressources marines. L'analyse des coquillages consommés montre que les habitants de Ras El Ma avaient déjà intégré la pêche et la collecte marine à leur économie de subsistance, une adaptation originale qui témoigne de leur ingéniosité.
- Les abris de Tacheta : Premières traces d'habitat organisé. Dans la périphérie nord-ouest de Tlemcen, les abris de Tacheta ont livré des traces d'occupation plus structurée, avec des foyers, des zones de travail et des concentrations d'outils en pierre polie, indiquant une organisation sociale plus poussée à la fin du néolithique. Des fragments de céramique décorée découverts sur ce site portent des motifs géométriques similaires à ceux des cultures berbères antiques, suggérant une continuité culturelle locale étonnante à travers les âges.
- Aïn Beïda : La mémoire enfouie des premiers foyers humains. A une dizaine de kilomètres au nord de Tlemcen, le site d'Aïn Beïda a révélé lors de prospections anciennes des outils en silex associés à des foyers fossilisés. Ce lieu semble avoir été utilisé de façon intermittente au cours du Paléolithique moyen, probablement par des petits groupes humains en quête d'eau et de gibier. Des strates de cendres et de charbon témoignent de l'utilisation maîtrisée du feu, non seulement pour la cuisson, mais aussi pour la protection contre les prédateurs. Une découverte banale en apparence, mais qui prouve la capacité de nos ancêtres à dominer leur environnement.
- Ghar Boumaâza : Située dans les contreforts sud de la région de Tlemcen, la grotte de Ghar Boumaâza est difficile d'accès, ce qui explique pourquoi elle est restée relativement préservée. Des fouilles confidentielles y ont mis au jour plusieurs pointes en silex finement travaillées ainsi que des ossements d'antilopes, de gazelles et de petits équidés. Les restes retrouvés dans cette grotte indiquent des pratiques de boucherie très organisées, avec des traces de découpe précises sur les os, suggérant une répartition bien définie des t$aches au sein du groupe.
- Aïn Témouchent, vallée de l'oued Senane : Même si Aïn Témouchent se situe un peu à l'ouest de Tlemcen, la vallée de l'oued Senane, qui traverse les deux régions, a servi de corridor migratoire préhistorique. On y a identifié des concentrations d'outils lithiques et de restes fauniques, indiquant une circulation régulière entre l'intérieur des terres et la côte. Certains outils retrouvés dans cette vallée sont en quartzite rouge, un matériau absent localement, preuve d'un réseau d'échanges entre groupes éloignés, l'ancêtre lointain des routes commerciales.
- Djebel Tessala, le sanctuaire oublié : Au sud-est de Tlemcen, le Djebel Tessala est plus connu pour son rôle dans l'histoire antique, mais des relevés récents ont aussi mis en lumière une présence humaine préhistorique sur ses hauteurs. Des percuteurs, des lames et des grattoirs ont été retrouvés dans de petits abris rocheux, datés de la fin du Paléolithique supérieur. La position dominante du site laisse penser qu'il était utilisé comme poste d'observation ou même de rituel, un lieu propice aux cérémonies liées à la nature ou aux ancêtre.
- Ouled Mimoun : Non loin de la commune d'Ouled Mimoun, des fragments de nucléus, des éclats et des lames abandonnés en grand nombre indiquent la présence d'un véritable atelier de taille en plein air, utilisé pendant le néolithique. Ce site encore peu étudié, pourrait avoir servi de centre de production d'outils pour une population sédentaire. Les archéologues y ont remarqué une régularité étonnante dans la forme des outils, ce qui suggère une standardisation des techniques, une sorte de "proto-industrie" de la pierre taillée.
- Sidi Senouci, le cimetière des anciens : Dans les plaines proches de Sidi Senouci, plusieurs tumuli (sépultures en pierre) ont été identifiés, associés à des fragments de poterie grossière et des outils en pierre polie. Ces structures funéraires témoignent d'une pratique rituelle déjà élaborée au néolithique. Une sépultures contenait des coquillages de mer disposés autour du crâne, signe d'un rituel funéraire symbolique.Cela renforce l'idée que ces sociétés possédaient déjà des croyances concernant la mort et l'au-delà.
- Mechraâ El Hammam : Situé près d'une source thermale naturelle, Mechraâ El Hammama révélé des restes de foyers, des outils de broyage et des restes de graines carbonisées. Ce site néolithique montre un début de sédentarisation basé sur la collecte de céréales sauvages. Les premières analyses palynologiques (pollens fossiles) suggèrent que les habitants de ce site pratiquaient une forme rudimentaire de proto-agriculture, semant volontairement des graminées près de la source.
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